Rodolphe Sepho repart à l'assaut des courses au large

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Jamais aussi à l'aise qu'en plein océan, Rodolphe Sepho est pourtant, comme de nombreux sportifs, assigné à résidence par la pandémie de Covid-19. Mais ses ambitions, elles, demeurent tournées vers le large. Le skipper vient de poser les dernières lignes de son projet "L'économie bleue au service de la jeunesse Guadeloupéenne" qui s'appuie sur deux piliers : la transmission des valeurs de la voile et la formation d'une nouvelle génération de skipper locaux.

Offensive Sport Mag' : Dès 2018, vous aviez annoncé la couleur : porter un projet plus ambitieux qui va au-delà de la Route du Rhum 2022. Et puis la pandémie intervient et tout ou presque est à l'arrêt. Comment vous projetez-vous avec cette nouvelle donne ?

Rodolphe SephoLa crise a ralenti nos projets, c'est clair. Mais nous avons su tirer le mieux de cette période difficile pour réfléchir à un nouveau projet baptisé « l’économie bleue au service de la jeunesse Guadeloupéenne », et, à partir de ce projet nous avons décliné un défi sportif qui va nous amener au départ du Vendée Globe en 2024 en passant par une transat Jacques Vabre en double en 2021 et la Route du Rhum en 2022.

OSM : Ce sont des courses sur lesquelles vous allez vous engager en Imoca, connaissez-vous déjà les caractéristiques de votre nouveau bateau ?

R.S. : Pour définir un peu les choses, pour les non-initiés, les imocas sont des monocoques de 18m de long, typiques du Vendée Globe. C’est une catégorie de bateau un peu spécifique, car ils sont de plus en plus déclinés avec des foils, ces appendices qui font littéralement voler les bateaux. De notre côté, nous avons commencé le travail un peu avant la dernière Route du Rhum en intégrant une équipe professionnelle, « La mie câline » menée par le skipper Arnaud Boissières aux Sables d’Olonne pour apprendre à naviguer et prendre en main ce bateau. L'imoca qui portera notre projet est bateau de 2017, foilé, performant, tout en carbone, à la jauge imoca, qui a participé au dernier Vendée Globe. Il va nous permettre de nous aligner sur les courses au large avec les meilleures armes possibles.

OSM : Quelles sont les sensations de navigation à bord d'un tel bateau ?

R.S. : La navigation est très différente. Ce sont des bateaux qui vont de 2 à 3 fois plus vite que les classe 40. C'est pour cela qu’il fallait que je les teste bien avant la Route du Rhum afin de prendre mes repères. Au-delà de cela, il est clair que les sensations sont magiques, multipliées par 10. Les efforts physiques sont tout de suite plus intenses pour dompter ce type de machine qui sont les "Formule 1" des mers. D'ailleurs, je dois mettre en place un programme de préparation physique exigeant. Il faut pousser le curseur loin et viser la performance. Je le conçois comme la suite logique de ma progression et une volonté de montrer que les Guadeloupéens sont capables de faire plus que du classe 40.

OSM : Quelles sont les prochaines étapes sportives dans le cadre de ce projet ?

R.S. : Nous avons voulu réfléchir à une solution qui nous permette de naviguer, en Guadeloupe, dans la Caraïbe et dans l’Hexagone. Donc, on va prendre le départ de la Jaques Vabre en novembre 2021 et ramener le bateau à l'arrivée en Martinique. Ensuite, nous allons établir le record du Tour de Martinique en équipage, suivi du temps de référence entre la Martinique et la Guadeloupe en solitaire. Ce sera ma première en solitaire sur le bateau. Puis on enchaîne avec le record du Tour de Guadeloupe avec les jeunes du défi sportif. 

À la fin de cette session, l'imoca sera mis en chantier en Guadeloupe pour aider les jeunes à travailler sur le projet pédagogique, et utiliser le bateau comme support pour améliorer leur formation sur la maintenance nautique. Ensuite nous partirons sur la RORC Caribbean 600 qui est une boucle dans la Caraïbe au départ et à l’arrivée d’Antigua. Elle nous permettra de valider ou pas les modifications que nous avons fait sur le bateau lors de la mise en chantier.

Avant la saison cyclonique, nous ramènerons le bateau dans l’Hexagone et en septembre 2022 on participera au défi Azimut, dernier grand rendez-vous avant la Route du Rhum.

OSM : Ce projet est ambitieux certes, mais il est aussi beaucoup plus cher. Comment arriver à le vendre localement ?

R.S.: Mon objectif est de continuer de pousser la course au large en Guadeloupe a son niveau maximum. Nous pensons que proposer un défi qui a du sens pour notre jeunesse et qui leur offre de vraies perspectives de carrière dans la nautisme peut séduire les partenaires. Mais au-delà des partenaires, c'est la population Guadeloupéenne de façon générale qu'on veut embarquer avec nous. Nous espérons que les Guadeloupéens se sentiront investis dans ce projet et iront plus loin avec nous. Nous savons qu'ils sont de plus en plus sensibles aux événements de la voile et j’ai à cœur de montrer qu’on l’on peut vivre de ce secteur et en faire de belles choses.