Mickael Benatar, le coeur au dojo, la tête dans le ring

Crédits : OSM

Combat
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Mickaël Benatar est arrivé presque au sommet de son art. Ce combattant Muay Thaï a un palmarès long comme le bras. Alors qu’il occupe la 6ème place du classement mondial, il a profité de la crise sanitaire pour réaliser l’un de ses projets : la création d’un club chez lui, en Guadeloupe. C’est là que nous l’avons rencontré.

C’est tout en haut d’un morne très pentu, typique des Grands Fonds, que le Makasi Fight Club a planté ses fondations. Dans un écrin de verdure, le dojo est ouvert aux quatre vents face à un somptueux coucher de soleil. Pour trouver ce bijou, il aura fallu patienter un an et rechercher sans relâche le lieu qui pourrait accueillir des élèves en les rapprochant le plus possible de l’ambiance du Muay Thaï.

 « Je recherchais quelque chose qui soit cohérent avec l’esprit du Muay Thaï et similaire à ce que j’ai pu voir en Thaïlande. Quand je suis venu ici, j’ai vu la roche, le jardin, la nature et puis ce coucher de soleil, j’ai su que c’était là. Et je ne suis pas déçu. » 

En 2020, alors que la crise sanitaire stoppe net la pratique sportive, elle permet, au contraire à Mickael Bénatar de se concentrer sur la création du club. C’est une étape supérieure pour lui, qui, jusqu’à présent donnait essentiellement des cours particuliers. 

 « À l’époque, les activités qui pouvaient se tenir à l’air libre bénéficiaient de plus de libertés que les activités de salle. Je l’ai vu comme une opportunité de me lancer pour de bon. »

Depuis, il se consacre à faire évoluer les aspirants combattants qui viennent à lui. Très investi dans l’enseignement de « la science des huit membres », il a pu constater jour après jour les qualités physiques et intellectuelles des Guadeloupéens. Même lorsque ses élèves n’ont pour seule ambition que l’envie de se dépenser et de profiter d’une activité en communauté, il s’étonne toujours de leur facilité à comprendre l’esprit de cet art de combat.

« La Guadeloupe c’est vraiment une terre de champions. Evidemment, il y a des qualités physiques, mais cela va plus loin que ça. Il y a une vraie intelligence et je m’en rends compte chaque fois que je tiens les pao (outil de travail poings, coudes, genoux pieds). J’ai travaillé à Paris et il n’y avait pas cela. » 

Grâce à cette étincelle supplémentaire, il y a déjà pu déceler deux champions en herbe, une fille et un garçon qui semblent tous deux vibrer différemment à son enseignement. Quand Mickael en parle, un sourire naît, parce qu’en réalité, ces moments avec ses élèves, l’enseignement et le partage sont des aspects de son sport qui le passionnent.

« J’ai toujours aimé que les gens se sentent bien à mon contact. Et mes élèves sont ma première préoccupation. J’établis un lien avec eux, je les connais tous et je les aime tous. Être à la fois témoin et artisan de leur évolution dans le sport, c’est très épanouissant pour moi. » 

Pour autant, à côté de l’enseignant, le combattant reste bien vivant et rêve encore d’aller chercher des titres.

Passer un nouveau cap

Jusqu’à présent, Mickael Bénatar a géré sa carrière professionnelle plus ou moins seul et avec pas mal de succès. Il est 6ème combattant mondial (76 et 79kg) selon le très sérieux classement WBC, il est double champion MTGP (Muay Thaï Grand Prix) et plusieurs fois champion de France selon les catégories. Il a évolué pas à pas vers les sphères mondiales en construisant une préparation double à la fois en Thaïlande, à la source et en France où il a vécu plus de 10 ans.

À 35 ans, Mickael Benatar est un combattant encore puissant, en forme et n’a pas mis au placard ses ambitions mondiales.

« C’est vrai que la salle me prend beaucoup de temps. Les élèves sont ma priorité, mais je suis jeune, en forme et il y a cette ceinture WBC dont je rêve depuis tant de temps qu’il me faut aller conquérir. Pour autant, mentalement, je suis encore coincé, car les deux projets (salle et carrière) sont assez difficiles à mener de front en même temps. Les résultats de 2022 sont assez clairs sur ce fait. »

En effet, après une série de 6 victoires consécutives, en 2021, puis en 2022, deux combattants mettent un arrêt à sa lancée. D’abord le Français Hamza NGoto, hyper solide, invaincu depuis 2018, et puis l’Australien George Mann détenteur de la ceinture WBC chez les 79kg. Deux combattants de haut niveau, mais qui montrent à Michael ce qui lui manque pour aller les titiller.

« Ces deux adversaires ont de vrais staffs, des équipes dédiées à les maintenir au meilleur niveau. De plus ils sont suivis par des partenaires qui les débarrassent de l’inquiétude financière et me rend comte que c’est exactement ce qu’il faut que je fasse. »

Encore faut-il trouver le temps de s’entraîner correctement. Et pour le faire, il faut renouer avec la Thaïlande, où des clubs l’attendent bras ouverts et lui ont déjà proposé des partenariats solides, mais c’est l’appel qui de la Guadeloupe qui a gagné face à leur propositions alléchantes. 

« Je rechigne vraiment a abandonner mes élèves pour aller en Thaïlande pour le moment. Et bien sûr les Thaïlandais n’iront pas délocaliser leur staff pour moi en Guadeloupe. Il faudrait que je me fasse remplacer sans pour autant que cela ne gêne ou ne déstabilise mes élèves. » 

Le coeur au dojo et la tête dans le ring, pour l’instant Michael Benatar n’a pas encore choisi. Si le champion sait qu’il ne pourra pas rester éloigné de la compétition bien longtemps, et n’en a d’ailleurs pas envie, pour le moment sa passion semble avoir élu domicile dans ce petit écrin tout en haut du morne.

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